Différents comportements face à l'alimentation durable

On observe un intérêt grandissant des consommateurs concernant l’impact de leur alimentation sur l’environnement. Néanmoins, ces intentions n’induisent pas toujours l’adoption de solutions ou de comportements plus durables. Jusqu’à présent, les consommateurs étaient souvent segmentés en 3 classes : les « engagés » (« green behaviour »), les « non engagés » (« non green behaviour ») et les intermédiaires, qualifiés parfois d’indifférents ou de « in-between ».

En 2021, une équipe de chercheurs suisse a souhaité mieux comprendre les différents comportements face à l’alimentation durable. Leur étude, portant sur 817 adultes suisses (entre 20 et 94 ans), a permis de segmenter les consommateurs sur la base des attitudes et des comportements et d’aller au delà des segmentations classiques basées sur des données socio-démographiques.

L’étude à mis en évidence 6 typologies de comportements et la compréhension de ces groupes a permis de proposer des recommandations adaptées à chaque groupe afin de promouvoir des comportement plus durables.

  • les Meat & fish eaters (19% des consommateurs) se caractérisent par leur consommation quotidienne de viande et de poisson. Ils accordent une moindre importance au bien être animal, à la santé, sont moins enclins à consommer des produits dits « sub-optimaux » (produits « moches » ou à DLC courte) et peu engagés niveau gaspillage. Il s’agit d’un groupe composé principalement d’hommes avec des revenus à la fois très hauts et très bas. Pour ce groupe, un des leviers proposé serait de modifier les représentations sociales de certaines pratiques, telles que celles de la viande rattachées actuellement à la masculinité ou encore de produits à courtes DVP ou imparfaits perçus comme produits de mauvaise qualité. Il s’agit en effet d’un groupe qui serait probablement très influencé par les facteurs externes tels que l’image renvoyée en société ;
  • Les Origin-focused savers (18%) attachent une importance forte à l’origine, à la saisonnalité et aux distances parcourues par les produits. Le goût est également un critère important pour eux. S’agissant d’un groupe dont l’âge moyen est le plus élevé (65ans), l’attachement à l’origine pourrait être lié à leur passé et à la croyance que les produits locaux sont meilleurs gustativement. Bien qu’ils aient une forte conscience environnementale, leur motivation à consommer local et de saison ne serait donc pas uniquement liée à la durabilité. De fait, ils sont peu consommateurs d’alternatives végétales. Pour les inciter à consommer davantage de produits végétaux, les auteurs suggèrent d’insister davantage sur les bénéfices santé.
  • Les Food waste reducing sharers (20%) réalisent les plus gros efforts pour éviter le gaspillage alimentaire de diverses manières : ils achètent des produits à DLC courtes, et ont forte tendance au partage, avec leurs amis ou via des services. S’ils ont un comportement distinctif vis-à-vis du gaspillage, ils attachent également de l’importance aux autres aspects de l’environnement. Groupe plutôt jeune, ils sont fortement engagés dans la préparation des repas, pour des questions de goût et de santé également et consomment peu de produits préparés. Un des leviers pourrait être de ré-enchanter certains produits comme les produits végétaux, et de mettre davantage en avant le plaisir de manger.
  • Les Ambiguous consumers (29%) sont caractérisés comme ambigus car ils attachent une certaine importance au bien être animal et à l’environnement, sans pour autant suivre des comportements particulièrement remarquables ou distinctifs. Il s’agit d’un groupe aux revenus plutôt élevés : les raisons économiques ne sont pas les plus importantes dans leurs choix. Leur apporter de l’information sur les impacts environnementaux peut permettre d’améliorer cette prise de conscience afin de s’engager dans des comportements plus durables.
  • Les consommateurs pro-environnementaux (5%) ont une forte conscience environnementale et sont motivés pour des raisons environnementales, éthiques et de santé, sur divers aspects. Ils consomment régulièrement des produits de substitution aux protéines animales, la moitié du groupe étant végétarien ou vegan. Ils sont fortement engagés vis-à-vis du gaspillage alimentaire avec l’utilisation de services de partage. Il s’agit d’un groupe constitué principalement des femmes, un niveau d’éducation élevé et des revenus intermédiaires. Les auteurs ne proposent pas de promouvoir davantage d’actions de sensibilisations, la nécessité porte sur le besoin de faire grandir ce groupe.
  • Les Renouncement aversives (9%) sont les moins sensibles et engagés dans les comportements pro-environnementaux. Leurs comportements seraient davantage guidés par la recherche de praticité (ils consomment des produits préparés) et d’intérêts économiques qui peuvent notamment expliquer leur motivation à éviter le gaspillage alimentaire. Il pourrait donc être judicieux de mettre en avant des arguments économiques vis à vis de certaines actions comme éviter le gaspillage alimentaire. S’agissant d’un groupe qui cuisine peu, en recherche de praticité, il pourrait être intéressant de proposer davantage de solutions pratiques déjà cuisinées.

Cette étude met en évidence différents profils de consommateurs qui diffèrent selon leurs comportements vis à vis de l’alimentation durable.

Lors d’une innovation alimentaire de produit ou de service, il est donc important de savoir bien définir la ou les cibles consommateurs, de comprendre leurs enjeux, motivations et freins afin de développer une solution adaptée, associée à une communication pertinente sur la valeur ajoutée.

Source : A. Funk, B. Sütterlin, M. Siegrist, 2021, Consumer segmentation based on stated environmentally-friendly behavior in the food domain, Sustainable Production and Consumption

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